Google accusé par ses employés d’avoir créé un outil pour les espionner

Une extension et de l'espionnage

 
La firme aurait développé une extension Chrome interne signalant tous les événements regroupant plus de 100 personnes. Une note d’un employé suggère que cela servirait à empêcher l’organisation collective des travailleurs.
Crédit : Benedikt Geyer // Unsplash

Il règne depuis plusieurs mois une atmosphère bouillonnante chez Google. Les employés de la firme de Mountain View ont fait part de leur grogne envers la direction sur des sujets tels que le harcèlement sexuel ou l’attitude envers les autorités chinoises. Face aux efforts d’organisation collective de leurs subordonnés, les dirigeants du géant veulent reprendre le contrôle.

Mais la dernière mesure en la matière semble au contraire avoir attisé les braises. D’après un mémo interne récemment vu par Bloomberg, des employés de Google ont découvert début octobre l’existence d’une équipe particulière au sein de leur entreprise. Celle-ci développait une extension pour la version spéciale de Google Chrome installée sur les ordinateurs de travail de la firme, qui sert aussi à naviguer dans les systèmes internes.

Signaler tous les événements de plus de 100 participants

Cet outil signalerait automatiquement les employés quand ceux-ci créeraient des événements calendriers ayant plus de 10 chambres ou plus de 100 participants. Pour le mémo, l’explication la plus plausible serait « une tentative par la direction pour être immédiatement mise au courant de tout début d’organisation par les travailleurs ».

Google se défend de telles intentions. « Ces allégations concernant l’opération et le but de cette extension sont catégoriquement fausses. C’est un rappel sous la forme d’un pop-up qui demande aux gens d’être attentifs avant de rajouter automatiquement une réunion aux calendriers d’un grand nombre d’employés ». L’extension aurait été développée en réponse à des usages abusifs des événements calendriers, et ne collecterait pas d’informations permettant d’identifier les personnes.

Le mémo aurait été diffusé sur un forum interne au début de cette semaine, et affirme que l’outil Chrome en question devait être déployé pour la fin du mois. Deux employés de Google en Californie déclarent à Bloomberg que l’extension a été rajoutée à leurs ordinateurs de travail dès cette semaine, et un autre signale qu’il s’agissait là du sujet le plus brûlant attendu à la réunion hebdomadaire de son équipe le jeudi.

À contre-courant de la culture ouverte

Pour l’auteur du mémo, l’extension problématique serait liée à la volonté de Google d’appliquer de nouvelles « règles de bonne conduite » (community guidelines). Celles-ci veulent notamment décourager les employés de parler de politique, entérinant ainsi un virage par rapport à la « culture ouverte » pour laquelle le géant de Mountain View était autrefois connu.

La firme avait déclaré en août être en train de développer un outil pour que les employés puissent signaler des posts internes problématiques. Une équipe de modération devait également être mise en place pour garder un œil sur les conversations dans les forums internes. Difficile de savoir si cet outil est lié à l’extension Chrome controversée, mais il semble au moins faire partie d’un même mouvement.

« un certain nombre d’inquiétudes vis-à-vis de la culture de Google »

Pour deux employés ayant commenté le mémo, l’extension Chrome aurait été développée depuis début septembre. Les porte-paroles de Google affirment eux qu’elle était mise au point depuis plusieurs mois. En fin septembre, l’outil aurait été évalué par l’équipe chargée de la confidentialité, qui aurait approuvé son déploiement, mais en notant « un certain nombre d’inquiétudes vis-à-vis de la culture de Google ».

L’affaire aurait tourné au vinaigre à partir de début octobre. Les ingénieurs responsables de l’extension auraient écrit que celle-ci ne pourrait pas être désinstallée par les employés, vu qu’elle serait « utilisée pour l’application de politiques ». Vers le milieu du mois, devant l’intérêt grandissant des travailleurs, certains d’entre eux se seraient vu l’accès bloqué à des documents internes rattachés au projet.

Ce n’est pas la première fois que Google est accusé par ses employés de mener de l’espionnage en interne. En 2016, une plainte avait été déposée contre un programme de la direction visant à empêcher la divulgation de documents confidentiels aux forces de l’ordre et à la presse.

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