L’Union européenne ne compte rien lâcher face à Apple. C’est à peu près de cette manière que l’on pourrait interpréter les propos de Thierry Breton, Commissaire européen au marché intérieur. Pourtant, pour satisfaire justement l’UE, la firme américaine a annoncé une série de changements importants pour ses iPhone à partir d’iOS 17.4, tout particulièrement au niveau de l’App Store.
Pour se conformer au Digital Markets Act (DMA), la législation européenne visant à lutter contre les pratiques anticoncurrentielles des géants du web, Apple a accepté d’ouvrir l’App Store à la concurrence.
Jusqu’à présent, pour télécharger une application, il fallait forcément passer par l’App Store d’Apple. De leur côté, les développeurs n’avaient pas d’autres solutions de distribution. Or, pour respecter le DMA, Apple a annoncé que les magasins d’applications alternatifs allaient désormais être autorisés. Un véritable chamboulement sur le papier : Apple accepte d’ouvrir son écosystème qu’il s’est toujours efforcé de maintenir fermé. Et sur un élément clé de surcroît.
L’Union européenne garde Apple à l’œil
De prime abord, on pourrait alors se dire que l’Union européenne a toutes les raisons de se féliciter d’avoir su faire plier Apple dans cette quête d’une concurrence plus saine et ouverte. Alors pourquoi Thierry Breton affiche-t-il plutôt un ton ferme ?
Sollicité par Reuters, le Commissaire européen a tout d’abord affirmé que « le DMA ouvrira les portes de l’internet à la concurrence afin que les marchés numériques soient équitables et ouverts. Le changement est déjà en cours. À partir du 7 mars, nous évaluerons les propositions des entreprises […] ». C’est surtout, ce qu’il ajoute ensuite qui sonne comme une menace contre Apple. « Si les solutions proposées ne sont pas assez bonnes, nous n’hésiterons pas à prendre des mesures fermes ».
Cette déclaration n’est pas anodine. Depuis les annonces de la marque à la pomme, plusieurs critiques ont fusé pour dénoncer les conditions dans lesquelles s’opère cette ouverture de l’App Store à la concurrence. D’aucuns estiment en effet qu’Apple reste le grand gagnant de ces changements tant il impose encore un certain nombre de règles décourageantes pour les développeurs souhaitant s’affranchir de l’App Store.
L’App Store s’ouvre à la concurrence… Vraiment ?
On pense notamment à la controversée Core Technology Fee. Ce nouveau frais va s’appliquer aux développeurs dont les applications ou les jeux dépassent le million de téléchargements. Une fois ce cap passé, ils devront verser 50 centimes d’euros à Apple chaque fois qu’une personne téléchargera leurs apps pour la première fois sur une période de 12 mois. Cette nouvelle commission s’appliquera même sur les apps ne générant aucun revenu.
Autrement dit, même si Apple pourra affirmer qu’il a assoupli ses règles en autorisant les développeurs à distribuer leurs applications sur d’autres stores que l’App Store, dans les faits, ces derniers passeront quand même à la caisse si leur app est populaire en Europe.
Précisons que cette Core Technology Fee ne sera prélevée qu’auprès des développeurs ayant choisi les nouvelles conditions de distribution proposées par Apple en Europe dans le cadre du DMA. S’ils le souhaitent, ils peuvent préserver les conditions d’utilisation qu’ils ont actuellement, en ne passant que par l’App Store. Ils ont donc le choix, mais la décision n’est pas aussi libre qu’Apple tend à le faire croire.
Plusieurs développeurs ont d’ailleurs manifesté leur grande colère contre Apple. C’est pourquoi les paroles de Thierry Breton sont intéressantes à garder en tête. Une fois le DMA officiellement entré en vigueur, le 6 mars 2024, l’Union européenne se penchera sur les mesures prises par les géants du web pour vérifier que tout est conforme. Or, on peut imaginer qu’elle continuera d’aller chercher des noises à Apple.
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