Pourquoi le licenciement de l’auteur du mémo antidiversité crée une telle polémique ?

 
Le licenciement d’un Googler, qui a publié un mémo sexiste critiquant la politique de diversité de l’entreprise, a créé une controverse qui prend de plus en plus d’ampleur chez Google et partout dans le monde. Julian Assange ainsi que de nombreuses autres personnes ont aussi exprimé leur soutien. À l’inverse, beaucoup ont largement salué Google pour avoir pris des mesures contre James Damore et défendu l’égalité des sexes sur le lieu de travail.

Vous avez probablement entendu parler du mémo d’un Googler publié en interne, qui explique comment les femmes et les hommes sont intrinsèquement différents et pourquoi nous devrions cesser d’essayer de permettre aux femmes d’être des ingénieurs. Le mémo a été initialement publié sur un forum interne et privé à Google. Mais il a été divulgué au public et est devenu viral. Par la suite, « VICE » a publié une version de ce mémo. Le débat ne s’est toujours calmé, depuis le licenciement lundi 7 août de James Damore, l’auteur du mémo sexiste critiquant la politique de diversité de l’entreprise. Il s’en est suivi toute une controverse, qui a beaucoup choqué les salariés de Google, et qui a surtout ravivé de nombreux combats culturels et identitaires partout dans le monde.

https://twitter.com/Cernovich/status/895015912759111680

Parfois, c’est même un véritable appel au boycott de Google qui a été formulé, largement diffusé par la mouvance alt-right américaine.

Chez Google, la controverse continue également. Les employés de Google, les Googlers, ont désormais peur pour leur sécurité. Après des harcèlements et des insultes, la vice-présidente de la diversité chez Google, Danielle Brown, a dû rendre son compte Twitter privé. Google avait prévu d’organiser une réunion avec ses employés, qui avaient été invités à envoyer leur questions à l’avance, néanmoins Sundar Pichai (CEO de Google) a finalement décidé d’annuler cette réunion. Il précise ainsi dans son email que plusieurs Googlers ne se sentent plus en sécurité dans cette atmosphère, et ont peur de poser des questions pendant cette fameuse réunion.

Julian Assange, le fondateur de WikiLeaks, en a profité pour proposer un emploi au Googler licencié : « La censure, c’est pour les losers. WikiLeaks offre un emploi à l’ingénieur James Damore licencié par Google ».

Pendant ce temps, les tribunes et manifestes se sont multipliés sur le Web, en prenant position pour Google ou pour le Googler viré.

Certains, dont le Googler licencié, ont été jusqu’à comparer Google à un goulag (les camps de travaux forcés en URSS). James Damore a d’ailleurs déjà oublié les 162 000 dollars de salaire (en moyenne) pour les ingénieurs, les repas gratuits, les massages et l’accès aux salles de sport, la protection sociale… le « Goolag » ne semble pas vraiment ressembler à un des pires génocides du vingtième siècle.

Pourquoi ce débat prend une telle ampleur ?

Comme on peut le voir, ce mémo est devenu le nouveau catalyseur pour les combats culturels et identitaires. Les progressistes ont largement salué Google pour avoir pris des mesures contre James Damore et pour avoir défendu l’égalité des sexes sur le lieu de travail. Tandis que les conservateurs ont utilisé le licenciement du Googler comme le dernier exemple de « culture politiquement correcte ».

La situation actuelle semble vraiment délicate pour Google, pris entre deux eaux. Google est à la fois critiqué pour son manque de diversité au sein de ses Googlers, qui sont majoritairement composés d’hommes blancs (sans parler de l’écart de salaire entre les hommes et les femmes). Mais Google est également critiqué pour avoir abandonné ses valeurs de liberté d’expression, que l’entreprise a toujours souhaité défendre.

Face à l’ampleur de la polémique, relayée par les médias américains, Danielle Brown a publié, dimanche 6 août, une réponse interne adressée aux « Googlers ». Elle y affirme notamment : « Nous sommes unanimement convaincus que la diversité et l’inclusion sont essentielles à notre succès d’entreprise. Pour mettre en place un espace ouvert et inclusif, il faut entretenir une culture dans laquelle ces opinions différentes, y compris politiques, peuvent être exprimées sans crainte. Mais ce discours doit se conformer [à nos principes d’embauche] et à nos règlements anti-discrimination. »

La mouvance alt-right américaine a sauté sur l’occasion pour mettre en avant la « monoculture idéologique en charge de votre accès à l’information », en critiquant la position de Google qui « contrôle de vastes portions de l’information diffusée sur Internet (…) le tribalisme intellectuel absolu et la réticence à considérer d’autres points de vue. Et pire : la diabolisation de quiconque avec de tels points de vue. ».

Cette mouvance a surtout profité de la médiatisation du licenciement pour créer une polémique. Pour citer Spider-Man : « un grand pouvoir implique de grandes responsabilités ». Ce qui signifie que pour une entreprise avec la portée et l’influence de Google, la neutralité n’est tout simplement pas une option. La mission de Google n’est pas d’organiser des réunions afin de trouver un compromis avec des personnes comme James Damore — cela ne ferait qu’infliger plus de dégâts qu’une légion de trolls misogynes blancs en colère. La firme doit plutôt chercher des solutions pérennes à ces problèmes. Google doit absolument prendre des mesures décisives et envoyer un message sans équivoque indiquant que ce genre de comportement n’est pas tolérable.


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