Aujourd’hui, tous les constructeurs prévoient de devenir 100 % électriques à plus ou moins court terme. Tous, vraiment ? Et non, car une marque résiste encore et toujours. Il s’agit de Toyota, qui n’a jamais vraiment été convaincu par cette motorisation, malgré le fait qu’il s’agira probablement de la seule qui sera autorisée à partir de 2035 en Europe. Et la marque nippone n’hésite pas à le dire haut et fort à qui veut bien l’entendre.
Une énergie dangereuse
En octobre dernier, Toyota affirmait alors que les voitures hybrides seraient aussi propres que les modèles électriques et qu’adopter cette motorisation à outrance ne serait pas forcément pertinent. En décembre dernier, Akio Toyoda, ancien patron de la marque désormais remplacé par Koji Sato remettait le couvert, en affirmant que « l’électrique n’est pas la solution à tout ».
Le dirigeant expliquait alors que « les gens travaillant dans l’industrie automobile font partie d’une majorité silencieuse » et que celle-ci « se questionne sur la pertinence de considérer les voitures électriques comme l’unique option ». Mais alors, pourquoi une telle défiance ? Eh bien voici que Gill Pratt, scientifique en chef pour Toyota nous donne la réponse à cette question qui nous taraude.
Pour ce dernier, celle-ci aurait notamment à voir avec la forte demande en lithium et les stocks qui diminuent à vue d’œil. À tel point d’ailleurs que les constructeurs craignent une pénurie de batteries pour leurs voitures électriques dans les prochaines années, après celle des semi-conducteurs. Selon le scientifique, il serait alors plus logique de répartir ce matériau dans les véhicules hybrides plutôt que de ne proposer que des voitures fonctionnant avec une seule source d’énergie.
Car, on le sait, les électriques ont besoin de batteries plus grosses pour afficher de grandes autonomies. Sauf que le poids est alors plus important, ce qui réduit alors la distance qui peut être parcourue en une seule charge. C’est le serpent qui se mord la queue. Et qui dit plus grandes batteries dit coûts en hausse, alors que le lithium coûte de plus en plus cher.
Voitures électriques versus hybrides
Mais ce n’est pas tout. Au-delà des soucis liés à la logistique, miser sur l’hybride serait également plus pertinent d’un point de vue environnemental. Gill Pratt propose une simulation relayée par Automotive News qui nous explique cela plus en détail. Pour cela, le scientifique prend 100 voitures thermiques, qui rejettent 250 g/km. S’il y a assez de ressources en lithium pour fabriquer une batterie de 100 kWh, deux choix sont possibles.
Il est alors envisageable de ne créer qu’un seul gros accumulateur et le mettre dans une voiture électrique comme une Tesla Model S, mais les 99 autres véhicules seront toujours alimentés par un moteur à combustion interne rejetant du CO₂ à l’usage, avec une moyenne de 248,5 g/km pour l’ensemble des 100 voitures.
La meilleure solution selon Toyota serait alors d’utiliser ces mêmes ressources pour créer de plus petites batteries et alimenter 90 voitures hybrides. Ainsi, les émissions moyennes tomberaient à 205 g/km.
Des nuances à apporter
On peut toutefois nuancer le propos de l’ingénieur. Celui-ci tient compte d’une contrainte : le fait de disposer d’une quantité finie de lithium à cause d’une demande supérieure à l’offre. C’est la conclusion de plusieurs prévisions. Mais il convient de nuancer celles-ci, puisque de nombreux gisements de lithium (que ce soit sous forme de mines ou de saumures géothermales), notamment en Europe, restent encore à exploiter.
Il y a aussi la piste du recyclage des batteries. Rappelons que Tesla est déjà capable de recycler plus de 92 % de ses batteries. Volkswagen prévoit, de son côté, de viser les 99 % de recyclage. De quoi permettre d’augmenter l’offre de lithium. Et c’est également sans compter sur la réduction des tailles des batteries (comme le prévoit Renault) grâce à la recharge de plus en plus rapide qui réduit la nécessité d’avoir de grandes autonomies.
Citons également une piste intéressante, et non des moindres : les batteries au sodium, n’utilisant pas de lithium. Ces batteries devraient être intégrées dans des voitures électriques dès la fin de l’année 2023, grâce au géant chinois CATL (à qui l’on doit la batterie aux 1 000 km d’autonomie qui se recharge en 10 minutes). Les premiers modèles pourraient être les citadines du constructeur chinois BYD même si ce dernier a démenti les rumeurs.
Les batteries au sodium ont l’inconvénient d’avoir une densité énergétique plus faible que les batteries au lithium. Mais c’était sans compter sur les futures batteries solides, permettant d’augmenter considérablement cette densité.
Pourtant, Gill Pratt possède un Tesla Model X, mais il explique que malgré son autonomie dépassant les 480 kilomètres, il n’est utilisé que pour parcourir moins de 50 kilomètres chaque jour. Le reste de la grande batterie n’est donc qu’un poids mort qui ne sert donc à rien. Mais ce problème est peu ou prou le même avec des hybrides rechargeables, qui possèdent également un accumulateur plus important que pour un véhicule hybride standard. Une motorisation qui pourrait de toute façon finir par disparaître, tout du moins en Europe.
Selon Toyota, une crise est à prévoir et ces futures pénuries prouveront que le choix du tout électrique n’est pas pertinent. Néanmoins, la firme propose tout de même un modèle 100 % électrique dans sa gamme, à savoir le bZ4X. Elle a également levé le voile en octobre dernier sur sa bZ3, une compacte destinée à la Chine qui devrait rivaliser avec la Tesla Model 3. Au mois de décembre, le constructeur profitait de son anniversaire pour présenter son Hilux Revo BEV, un pick-up électrique rival du Ford F-150 Lightning.
Pour aller plus loin
À quel point Tesla recycle ses batteries ?
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