« Les gens faisaient n’importe quoi avec nos vélos » : le PDG de Brompton nous explique pourquoi le G Line est une (r) évolution logique

 
Nous avons rencontré le PDG de Brompton, Will Butler-Adams, qui nous rappelle les valeurs de la marque et en quoi le Brompton G Line est un vélo pliant (électrique) unique en son genre.
Le vélo pliant électrique Brompton G Line. // Source : M. Lauraux pour Frandroid

Il mesure deux mètres, ce n’est donc donc clairement pas le type de gabarit que l’on imagine au guidon d’un vélo électrique Brompton. Pourtant, c’est bien le PDG de la marque, Will Butler-Adams, qui vient nous accueillir au milieu de Paris avant une journée d’essai. Son déplacement est logique dans la capitale, car il vient supporter l’un des lancements parmi les plus importants de la marque depuis sa création en 1975 : le G Line (électrique).

Un dépliage de la popularité lent

Brompton, c’est l’œuvre d’Andrew Ritchie, « un marginal, un excentrique totalement déterminé », nous confie Will. « Tout le monde s’est moqué de lui ou a tenté de le démoraliser », ajoute-t-il. « En 1975, c’était le pire moment pour lancer un vélo ».

Le succès n’a pas été immédiat, avec des années de développement dans un petit atelier de Londres, durant lesquelles les amis, puis amis d’ami, l’ont adopté par du bouche-à-oreille. Dès le début des années 1980, une petite popularité a poussé la marque vers la voie de l’industrialisation, mais ce n’est qu’en 1988 que l’activité commerciale a démarré. Poids lourd de l’époque, Raleigh refusa de produire le Brompton, qui restera finalement totalement indépendant, avec sa propre usine de Sheffield.

Will Butler-Adams est arrivé chez Brompton en 2002, le fruit d’un hasard. « J’ai rencontré une personne dans un bus à Londres qui avait fait ses études avec le créateur de Brompton, et m’a conseillé d’entrer en contact avec lui« . Alors ingénieur, Will revient deux mois après dans la capitale anglaise pour ne plus la quitter, débutant une carrière longue de 22 ans au sein de la marque, dont il a pris les rênes en 2008.

Brompton PDG Will Butler-Adams
Le PDG de Brompton, Will Butler-Adams, soulevant le T Line (7,45 kg) // Source : M. Lauraux pour Frandroid

De 27 employés, le fabricant du vélo pliant a changé de spectre, avec aujourd’hui 800 salariés, tandis que les ventes ont dépassé 1,2 million d’unités au cumul. Certes, 2023 a été une année compliquée dans un contexte de crise pour l’industrie du cycle, résultant en une baisse de 5 % à 90 000 unités annuelles, et la suppression de 70 postes. « Toutefois, nous ne sommes pas inquiets, le segment reste globalement en croissance », rassure Will.

Une philosophie

« Nous ne sommes pas conduits par le profit », confie le dirigeant. « Nous faisons le yoyo autour de la rentabilité, qui ne nous intéresse pas. Notre priorité va dans l’investissement, chose primordiale pour conserver un vélo à la pointe ». Ainsi, le Brompton G Line est assurément sa meilleure arme pour (re)conquérir le marché, même si l’entreprise n’a jamais vocation à rouler sur l’or.

Brompton Electric
Frandroid a testé la version électrique Brompton Electri C Line // Source : Arnaud Gelineau pour Frandroid

« Certains jouent le coût contre la valeur, nous, nous visons la valeur », poursuit Will. « On ne fait pas des objets pour les réseaux sociaux, on prend le parti de ralentir, d’être plus patient pour avoir du recul. On apprend aussi à nos vendeurs de vendre les vélos correspondant le plus aux besoins, et même de ne pas vendre a ceux qui n’en ont pas besoin ».

Il faut comprendre aussi le personnage qu’est Will Butler-Adams pour adopter la philosophie Brompton. Nous avons eu personnellement une longue conversation avec le dirigeant, alors que nous testions la praticité du G Line, capable d’être logé dans un coin du RER avant d’arpenter les sentiers de l’Essonne. Son discours est celui d’un défenseur du vélo mais surtout d’un mode de transport écologique, et actif, bénéfique pour la santé.

Brompton magasin Paris
Le magasin Brompton Junction à Paris. // Source : M. Lauraux pour Frandroid

Brompton G Line, le grand frère perpétuant la tradition

Premier vrai nouveau vélo depuis les débuts de la marque, le Brompton G Line veut coller à la mentalité du groupe. « Nous avons développé des vélos pendant 50 ans, les clients n’ont jamais arrêté de faire n’importe quoi avec, de repousser les limites », explique Will Butler-Adams, « Nous-mêmes l’avons mené aux extrêmes en montagne, en traversant rivières et océans ».

L’histoire du Brompton G Line a débuté il y a 8 ans, quand la firme londonienne a confié deux prototypes à des étudiants, avec la volonté d’aller en dehors des villes. Car il faut rappeler que le motto de départ de la firme est Urban Freedom for Happiness, « une liberté urbaine pour le bonheur ». Le G Line aspire donc à se transporter partout ailleurs.

Brompton G Line Electric vélo pliant gravel électrique
Grâce à un guidon large, des pneus polyvalents et un moteur plus pêchu, le Brompton devient gravel ! // Source : Brompton

Toutefois, le G Line cultive toujours la philosophie de la société. « Par exemple, nous avons choisi de mettre un moteur arrière, ce qui n’est pas le plus sexy [ndlr : comparé à un moteur central] mais plus réparable. Nous allons à contresens du marché, qui tend à faire acheter des vélos tous les 5 ans. Nous faisons le contraire, avec un Brompton dont nous dessinons des pièces spécifiques, que l’on peut garder 10, 20, 30 ou 40 ans« .

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Source : Brompton

Cela expliquerait pourquoi le développement de la gamme est si long et pourquoi Brompton s’est contenté de son petit vélo pliant 16 pouces depuis ses débuts, tout en le peaufinant progressivement. Préférant l’acier à d’autres matériaux plus polluant, la firme anglaise se concentre aussi au recyclage.

Pourquoi le Brompton G Line ?

On vous disait donc que les clients de la marque jouaient aux casse-cous. C’est le cas déjà avec le « Brompton World Championship » organisé depuis 2006, et même des compétitions nationales, avec pour épreuve reine un sprint au guidon du petit vélo pliant. Le G Line répond plutôt à ceux qui veulent s’aventurer sur les chemins, « où le Brompton était un peu trop chétif« , avoue Will Butler-Adams. 

Visant un minimum de confort et de stabilité, il apporte des freins performants, un guidon spécifique très large et des roues bien plus polyvalentes. Pour le patron, la nouveauté repose sur « un compromis, plus grand et lourd« . Or comme nous l’avons vu lors de l’officialisation, il empreinte le même mécanisme de pliage unique et la compacité du petit frère. Un défi, qui a probablement réclamé une bonne partie du budget de recherche et développement, communiqué à hauteur de 5 millions d’euros par an.

Brompton G Line Electric poids
Avec batterie, le Brompton 20 pouces pèse 19,5 kg. // Source : Brompton

Pour le moment, le G Line n’existe que dans une unique version, avec un cadre en acier, déclinée en vélo électrique pliant Electric G Line. « Ce vélo va continuer d’évoluer, comme l’original depuis 50 ans« , rassure Will. En effet, le modèle 16 pouces a multiplié les versions : un cadre en titane pour le T line ou encore différentes transmissions à l’image de la récente variante à 12 vitesses. Ainsi, on imagine sans peine de nouvelles versions du G Line, sans oublier les collaborations et éditions spéciales (telle celle des JO de Paris). Et pourquoi pas des vélos cargos façon Ca Go CS, Muli ou Monopole ?

« On y pense bien sûr, car il viendrait appuyer notre slogan de ‘liberté urbaine’ mais comme je vous l’ai dit, nous faisons les choses bien, à notre allure, la priorité étant le G Line ». Longue vie au vélo pliant 20 pouces Brompton ?


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